La privation sensorielle est un syndrome que l’on retrouve fréquemment chez le chien, mais il existe également chez le chat. Il s’exprime sous différentes formes et le pronostic d’amélioration est très variable. C’est une des pistes que l’on explore pour un animal peureux. Essayons de mieux le comprendre !
Le développement cérébral du chien
Le chiot et le chaton naissent avec un cerveau dont le développement est beaucoup moins abouti que le cerveau d’un nouveau-né humain. Les neurones ne peuvent pas encore bien communiquer entre eux, les gaines de myéline (permettant la communication électrique) ne sont pas toutes encore en place : elles le sont à l’âge du sevrage (de 4 à 8 semaines).
S’en suit une phase où les facteurs externes stimulent particulièrement le cerveau encore « plastique », pour compléter son développement cognitif. Le chien ou le chat « cartographient mentalement » l’environnement et s’imprègnent de ses caractéristiques, pour apprendre à y réagir de façon adaptée. Ce phénomène est particulièrement important lors du 3e mois de vie de l’animal, mais se prolonge (et s’entretient) les mois suivants.
Il arrive (trop) souvent qu’un chien ou chat ait évolué lors des premières semaines et mois de sa vie dans un milieu très pauvre en stimulations : un box, une cave, ou une pièce sans lumière. L’environnement dans lequel il est plongé ne lui permet pas de se familiariser avec tous les éléments de la vie quotidienne : bruits, voitures, congénères et humains de toute sorte … De ce fait, sa « cartographie mentale » des éléments jugés habituels et non dangereux est extrêmement réduite. Le développement complet ne peut pas se réaliser. On retrouve souvent cette situation dans les élevages industriels (ou juste peu scrupuleux) ainsi que les animaleries. Certains animaux vont tout de même arriver à retrouver une vie normale après quelques mois d’habitation, d’autres n’y parviennent pas et développent un syndrome de privation sensorielle plus ou moins poussé.
Tout animal peureux, qui se cache ou qui agresse, envers plusieurs types de stimuli, au passé inconnu ou décrit ci-dessus, peut faire penser à ce syndrome. Il s’exprime sous différentes formes :
Le stade 1 (Phobie)
Le chien ou chat est effrayé par un ou des déclencheurs identifiés (humains, voitures, chiens, poubelles, …). Il a généralement une posture basse en promenade, cherche à éviter ce qui le terrorise ; ou au contraire, il peut avoir une posture haute par peur (transformée en colère) et agresse les stimulus.
On peut observer des agressions de peur (soudaines, sans menace, le chien luttant pour sa survie) et/ou de distanciation (le chien menace pour éloigner le stimuli et se calme avec la distance). La sécurité sera la première préoccupation. La présence d’une laisse courte amplifie le phénomène car le chien ne peut pas fuir ni attaquer, réactions naturelles en cas de danger.
Le stade 2 (Anxiété)
L’animal est prostré, car il généralise la peur à tout ou grande partie d’un environnement dans lequel il est en hypervigilence. Il peut refuser de sortir dans la rue et/ou ne plus faire ses besoins dehors, tétanisé et tremblant. Il n’explore pas l’environnement en question, ce qui est pourtant un comportement d’apaisement normal.
Il peut développer un hyperattachement secondaire voire faire de l’anxiété de séparation en l’absence de sa figure de sécurité (vous). Il présente des comportements de substitution tels que le léchage, mange de l’herbe, peut mal digérer, dort mal avec un sommeil entrecoupé, les femelles peuvent faire des grossesses nerveuses.
Cette anxiété peut s’exprimer par phases, on parle alors d’anxiété intermittente : le chien ou le chat va chercher partout le stimuli qu’il craint et se mettre à paniquer par anticipation.
Le stade 3 (Dépression)
Le chien ou le chat ne supporte plus d’être en permanence dans la crainte et est totalement prostré. Il ne joue plus, n’est pas intéressé par ses promenades. Il bouge peu, peut se faire dessus, perd l'appétit et parfois l'envie de boire.
Le pronostic vital du chien pouvant être rapidement engagé, un avis vétérinaire est à prendre en première intention et en urgence.
Les chiens et chats peuvent passer d’un stade à l’autre au cours de leur vie. Les stades 2 et 3 sont difficilement améliorables. Dans tous les cas, même avec beaucoup d’exercices, on aura du mal à retrouver un chien à 100% détendu dans un milieu très stimulant (la ville par exemple). Ce qui veut aussi dire qu’on peut faire plus que 0% d’amélioration, souvent avec un couplage médication/exercices.
Que faire face à ce syndrome ?
La première chose est de bien comprendre son animal. Il faut se mettre à sa place, être calme et doux car un rien est terrorisant. Abaissez votre seuil d’exigence, renseignez-vous sur ses besoins et cherchez à les combler. La première chose sera de faire en sorte que l’animal ait confiance en vous. Cela peut passer par une période où vous êtes simplement avec lui, à l’intérieur, sans le solliciter car vous respectez son espace et ses émotions. Des règles de vie doivent aussi être instaurées : elles rassurent l’animal car cela ajoute de la prédictibilité à son quotidien. Une routine peut progressivement être mise en place.
Une fois que vous jouez une figure de sécurité et que le chien ou chat vous fait confiance, repérez ce que ce chien ou chat aime faire : quel est son jouet préféré (s’il arrive à jouer) ? Qu’aime-t-il manger ? Repérez avec quoi vous pourrez le récompenser. Apprenez par ailleurs à repérer son seuil de peur : la distance et l’angle d’approche joue beaucoup. Cette observation vous servira ensuite pour travailler sur de la désensibilisation, pour respecter ce seuil et très progressivement l’augmenter sans jamais l’atteindre (si possible avec un professionnel pour commencer). Si aucune configuration de désensibilisation ne rassure votre chien ou chat, une médication peut être envisagée, avec l’aide d’un vétérinaire.
Enfin, garantissez sa sécurité : gardez-le en laisse/longe et harnais (à 3 points d’attache s’il a tendance à s’en défaire). Lors des exercices dans un environnement contrôlé, vous pourrez aussi vous servir d’une longe pour que l’animal soit plus libre de ses mouvements et prenne progressivement confiance.
Le rythme d’évolution dépend de plusieurs facteurs : le chien, son passé, le stade du syndrome, l’humain, le coach comportementaliste, les protocoles mis en place, … L’évolution est lente et la plupart reste craintive à vie, de par le développement cérébral incomplet. Mais des améliorations peuvent être observées avec douceur et patience !
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